Le baron de Sigognac dans le rôle du Capitaine Fracasse

Charles BETHOUT

Date : 1943

Matériaux et techniques : Gouache sur papier.

Description : En 1943 Abel Gance réalise une adaptation du roman Le Capitaine Fracasse. Pour la confection des costumes il fait appel au dessinateur attitré de la Comédie française, Charles Bétout. Ce dernier s'inspire directement des descriptions très picturales données dans le roman par Gautier. Lui-même s'était documenté en compulsant Le Magasin pittoresque de 1834 dans lequel figurait une illustration de Matamore par Andrew, Best, Leloir.

« Ce costume consistait en un pourpoint bombé comme un corselet, et zébré de bandes diagonales alternativement jaunes et rouges qui convergeaient vers une rangée de boutons, en manière de chevrons renversés. La pointe du pourpoint descendait fort bas sur le ventre. Les bords et les entournures en étaient garnis d’un bourrelet saillant, aux mêmes couleurs ; des rayures semblables à celles du pourpoint décrivaient des spirales bizarres autour des manches et de la culotte, donnant aux bras et aux cuisses un air risible de flûte à l’oignon. Si l’on avisait de chausser un coq de bas rouges, on aurait l’idée des tibias du Matamore. D’énormes bouffettes jaunes s’épanouissaient comme des choux sur ses souliers à crevés rouges ; des jarretières à bouts flottants serraient au-dessus du genou ses jambes aussi dénuées de mollets que les pattes échassières d’un héron. Une fraise montée sur carton, dont les plis empesés dessinés une série de 8, lui cerclait le col et le forçait à relever le menton, attitude favorable aux impertinences du rôle. Sa coiffure consistait en une sorte de feutre à la Henri IV, retroussé par un bord et accrêté de plumes rouges et blanches. Une cape déchiquetée en barbe d’écrevisse, des mêmes couleurs que le reste du costume, flottait derrière les épaules, burlesquement retroussée par une immense rapière, à laquelle le poids d’une lourde coquille faisait relever la pointe. Au bout de ce long estoc, qui eût pu servir de brochette à dix Sarrasins, pendait une rosace ouvrée délicatement en fils d’archal fort ténus, représentant une toile d’araignée, preuve convaincante du peu d’usage que faisait Matamore de ce terrible engin de guerre. Ceux d’entre les spectateurs qui avaient les yeux bons eussent même pu distinguer la petite bestiole de métal, suspendue au bout de son fil avec une quiétude parfaite et comme sûre de n’être pas dérangée dans son travail. »

Théophile Gautier , Le Capitaine Fracasse.