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MELMOTH RECONCILIE

par Max MILNER

 

I. L'HISTOIRE

Le caissier Castanier, au moment où il s'apprête à partir pour l'étranger avec une très grosse somme d'argent dérobée à sa banque, reçoit la visite de John Melmoth, le héros mythique du roman de Charles Robert Maturin, Melmoth ou l'homme errant, ayant reçu de Satan des pouvoirs illimités en échange de son salut éternel. Usant de ses dons surnaturels lors d'une seconde rencontre, celui-ci persuade Castanier que son forfait est découvert et que sa seule ressource est d'hériter des pouvoirs et de la malédiction attachés au pacte. Le caissier accepte et devient désormais capable de satisfaire tous ses désirs, mais il n'aspire plus qu'à la seule chose qui lui soit interdite : être auprès de Dieu pour l'éternité. La mort édifiante de Melmoth le convainc qu'il doit, à son tour, se débarrasser du pacte. Ce dernier, circulant parmi les habitués de la Bourse, se dévalue en passant de main en main et échoue dans celles d'un clerc de notaire que ses excès sexuels conduisent au tombeau.

 

II. HISTOIRE(S) DU TEXTE

Melmoth réconcilié, dont les projets primitifs (1830-1832) s'intitulent Le Dernier Bienfait de Melmoth-le-Voyageur et La Fin de Melmoth, a été publié pour la première fois en tête du tome VI du Livre des Conteurs, chez l'éditeur Lequien, en juin 1835. On n'en a retrouvé ni le manuscrit, ni la plupart des épreuves. Le texte a subi peu de modifications d'une édition à l'autre.

– Deuxième édition au tome XXII des Etudes philosophiques chez Werdet (1836), entre Jésus-Christ en Flandre et L'Eglise.

– Troisième édition au tome XIV de la Comédie humaine chez Furne (1846), entre Jésus-Christ en Flandre et Le Chef d'oeuvre inconnu. Dans le Catalogue de 1845 il le plaçait entre Jésus-Christ en Flandre et Massimilla Doni. Puis, en révisant l'édition Furne, Balzac avait songé un moment – on comprend pourquoi – à faire suivre immédiatement Melmoth réconcilié par La Recherche de l'absolu, mais il a biffé cette suggestion sur son exemplaire.

– Le dernier (le Furne corrigé) ne comporte que deux corrections manuscrites, dont une seule présente un certain intérêt : Balzac a biffé le nom de Mathéo, ce personnage réel, condamné aux travaux forcés en 1826, et écrit à la place : « célèbre caissier ».

 

III. PERSONNAGES

En dehors de Nucingen (tout caissier a besoin d'une banque), les seuls personnages figurant dans ce roman (autrement que d'une manière tout à fait fugitive) qui reparaissent dans la Comédie humaine sont :

– AQUILINA : appelée aussi Mme de La Garde ; courtisane reparaissant dans La Peau de chagrin et, plus discrètement, dans Une fille d'Eve.

– Charles CLAPARON : homme d'affaires et usurier, dont les activités sont surtout décrites dans César Birotteau.

– EUPHRASIE : autre courtisane, compagne de roman pour Aquilina.

 

IV. LECTURES ET COMMENTAIRES

Avec Melmoth réconcilié, le fantastique balzacien et les idées philosophiques qu'il incarne (pouvoir destructeur des idées et des passions, imprescriptibilité des limites imposées à la condition humaine) s'insèrent dans une réalité sociale très proche de celle du Père Goriot, publié la même année. D'un autre côté on peut se demander ce qui serait devenue la peau de chagrin, entre les mains de Castanier, et subissant le processus de la dévaluation boursière.